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  • Photo du rédacteurFlorent Vandepitte

"Il n'est point d'hommes en cette terre dont la culpabilité soit totale..."

A la veille du vote historique de l’Assemblée nationale pour l’abolition de la peine de mort, Robert Badinter, ministre de la justice, s’adresse aux ministres et aux députés présents pour défendre sa proposition de loi. Cet avocat s’était fait connaître en évitant la guillotine à Patrick Henry, accusé du meurtre d’un garçon de sept ans, en 1976. Après l’élection de François Mitterrand à la présidence de la république, l’avocat accédait à la fonction de Garde des Sceaux et pouvait porter son combat à l’échelle nationale contre la peine capitale.


La France est alors la dernière grande démocratie d’Europe occidentale à pratiquer cette sentence. Une majorité de Français, 62 % d’après les sondages d’opinion de l’époque, reste même très attaché à la peine de mort. François Mitterrand avait pourtant choisi de porter ce combat abolitionniste à la 53e place de ces 110 propositions formulées lors de sa campagne. Avec la légitimité d’un chef d’État fraîchement élu, le premier président socialiste de la Ve République décide d’inscrire l’abolition de la peine de mort à l’agenda parlementaire dès la rentrée de septembre.


Robert Badinter accepte alors de relever cette délicate mission, lui qui avait voué sa vie professionnelle à la lutte contre la peine de mort. Dans un discours passé à la postérité, il renvoie les membres de la représentation nationale aux grandes voix de l’abolitionnisme, de Victor Hugo à Jean Jaurès, en passant par Léon Gambetta ou Georges Clémenceau. Il n’hésite d’ailleurs pas à mobiliser sa propre expérience d’avocat pour en conclure que les erreurs judiciaires rendent les exécutions « moralement inacceptables ».


Au terme du vote des deux chambres, la peine de mort est définitivement abolie le 10 octobre 1981. Son abolition est aujourd’hui garantie par la constitution ainsi que par la Convention européenne des droits de l’homme. Hamida Djandoubi demeure ainsi la dernière personne à être « coupée en deux », selon l’expression utilisée à l’époque. L’assassinat et la torture de son ex compagne lui vaut en effet de subir la guillotine le 10 septembre 1977 à la prison des Baumettes de Marseille.


Pour autant, le camp du maintien ne s’avoue pas vaincu. 27 textes ont été soumis entre 1984 et 1995 pour tenter de rétablir la peine de mort. C’était avant l’inscription à l’article 66.1 de l’interdiction de la peine de mort par Jacques Chirac, lui qui s’était déjà illustré en 1981 comme l’un des rares députés de la droite à soutenir le texte en faveur de l’abolition.


De nombreux pays continuent néanmoins d’appliquer l’exécution comme peine. Plusieurs centaines de condamnés sont ainsi exécutées principalement en Chine, en Iran ou en Arabie Saoudite. Déclaré coupable du meurtre d’un fonctionnaire lors d’une manifestation en 2018, le jeune lutteur iranien Navid Afkari en est l’une des dernières victimes en date. Il a été exécuté le 12 septembre 2020, malgré la mobilisation internationale pour tenter de lui éviter la peine capitale. Ironie de l’histoire, cette sentence intervient au moment ou un sondage révèle le soutien de 55 % des Français au rétablissement de la peine de mort en France.


Des manifestations d'hommage sont organisées partout dans le monde, comme ici à Toronto, après la mort de Navid Afkari, champion iranien de lutte, exécuté à l'âge de 27 ans.



Ce discours de Robert Badinter est l'un des 50 discours commentés et analysés dans Les Grands Discours politiques pour les nuls, paru en 2020.


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